AFRIQUE - ZAMBIE


La Zambie, "a friendly country" comme nous l'annonce le panneau de la frontière à l'entrée du pays. "The real Africa", comme l'indique le panneau de la sortie. Et on ne peut pas dire le contraire ! Les Zambiens sont les gens les plus souriants, joyeux et adorables que l'on aura rencontrés du voyage. 


La Zambie est un grand pays d'Afrique centrale, que nous avons traversé sur plus de 1600km. Ses voisins sont le Congo, l'Angola, le Malawi, la Tanzanie, le Mozambique, le Zimbabwe,  et le Botswana. 

La Zambie pour nous c'était le pays de la bonne humeur. Des sourires, des coucous.. Les Zambiens aiment rigoler et la bonne humeur est communicative ici ! C'est aussi un pays très sûr, et les Zambiens sont très fiers du calme qui règne dans leur pays, contrairement à de nombreux de leurs voisins, le Zimbabwe et la République démocratique du Congo entre autres. 


La Zambie, c'est un peu le voyage en Afrique pour les débutants. Tout y est facile. Les gens sont hyper sympas, respectueux de ton espace privé et parlent très bien anglais. On trouve à manger partout et les routes sont en bon état... Pour les amateurs de pistes de terre, elles traversent la brousse avec des villages assez régulièrement et sont assez empruntées par les sympathiques Zambiens, eux mêmes à vélo.. Pas trop de dénivelés non plus. Bref, le vélo facile ! 


De Tunduma à Lusaka

Mais tout n'est pas si simple en Zambie, notamment si, comme nous, vous arrivez en saison chaude. Il fait extrêmement chaud et lourd durant toute la première partie de notre temps dans le pays. Nous sommes en novembre, le mois qui précède la saison des pluies. La chaleur monte peu à peu et devient suffocante.. Mais aucun nuage à l'horizon. Tous les ans, la température monte, dépassant largement les 40, jusqu'au jour où les premières pluies feront redescendre enfin la température. L'air est saturé de poussière et la température ne descend presque pas pendant la nuit. On est fatigués et même plusieurs jours de pause ne suffisent plus à nous remettre les compteurs à zéro.


Néanmoins, malgré la fatigue physique, on peut vraiment souffler en Zambie car, enfin, on retrouve un semblant de vie privée, le sentiment d'être presque incognito. Contrairement aux pays voisins, où notre passage déclenchait des mouvements de foule et où des masses de spectateurs nous entouraient absolument toute la journée, en Zambie l'ambiance est beaucoup plus cool ! Un coucou, un sourire, mais avec un peu de retenue. On ne déclenche aucune excitation quand on arrive quelque part, et franchement c'est reposant. 


À vélo, lorsque l'on mange dehors et dort en tente, aucune bulle d'intimité entre nous et le monde. Et quand on est deux blancs en pleine brousse, parfois on en rêve de cette intimité ! En Zambie, nous avons donc pu vivre le plaisir délectable de poser la tente, discuter avec les villageois, raconter quelques blagues, puis profiter d'un merveilleux moment de calme pour s'installer, où les adultes demandent aux enfants de s'écarter au moins à une dizaine de mètres réglementaires et où nous pouvons alors nous sentir parfaitement à l'aise dans le nid douillet de notre tente. 


Depuis le temps que l'on voyage, je crois qu'une chose qui m'aura particulièrement frappée c'est la facilité que l'on a à se sentir à la maison une fois que la tente est montée et que tout autour de nous nous ne voyons que des sourires doux et chaleureux. Nous ne ressentons pas tant le mal du pays. La famille et les amis nous manquent. Mais nous arrivons à nous sentir parfaitement à notre place, malgré les différences de langue et de culture. Le déplacement lent que permet le vélo y est pour beaucoup. 

De Tunduma, la ville frontière, à Lusaka, la capitale, ce sont presque 1000km de ligne droite qui traverse une brousse toute sèche. Il n'a pas plu depuis la saison humide de l'année dernière et tout est jauni par le soleil. La route est monotone, nous sommes fatigués par des semaines de route assez monotone  également dans le sud de la Tanzanie.. Bref, nous sommes assez impatients d'arriver à Lusaka pour s'y reposer, manger plein de bonnes choses et partir pour la pause de Noël !


Nous roulons en mode "pilote automatique", les écouteurs dans les oreilles et la tête dans le guidon...


L'ugali que l'on mangeait au Kenya et en Tanzanie s'appelle désormais le nsima. Mais le plat de tous les jours reste le même depuis l'Ouganda.. Et les Zambiens mangent particulièrement la même chose à chaque repas. Matin, midi et soir. Un plat de nsima, avec quelques légumes et une viande. Tous les jours, partout, un seul plat au menu. Seule la viande change : souvent du poulet, parfois du bœuf, ou du poisson. Pour les végétariens, c'est tous les jours farine de maïs et légumes verts bouillis. Même si ça n'a pas beaucoup de goût, on est à chaque fois super heureux de manger. Le nsima on en trouve partout, ça cale bien, et après une journée de vélo c'est un plaisir de toujours trouver un plat chaud et prêt à manger à toute heure de la journée ! La prédominance absolue du maïs dans cette partie de l'Afrique nous choque quand même. Une plante aussi gourmande en eau, dans un endroit aussi sec.. Il fallait vraiment que Monsanto passe par là.. 

Alors, il faut puiser dans les sols et arroser encore et toujours cette plante assoiffée. 


Du nsima dans les marmites...
Du nsima dans les marmites...
Les premiers nuages ! Le mois qui précède la saison des pluies, tout le monde guette désespérément le ciel bleu dans l'espoir de voir arriver enfin un nuage !
Les premiers nuages ! Le mois qui précède la saison des pluies, tout le monde guette désespérément le ciel bleu dans l'espoir de voir arriver enfin un nuage !

La région qui s'étend juste au nord de Lusaka s'appelle la "ceinture de cuivre" car c'est une région de très grande exploitation minière. Et cocorico, on y retrouve les français. Par contre, ce n'est pas vraiment une fierté... Les entreprises qui sont sur place pour exploiter le métal ont des contrats assez louches, où les exploitants sont richissimes et côtés en bourse, mais où rien, à part les miettes, ne revient aux populations locales. Sinon la pollution des sols... Hum..


On arrive enfin à Lusaka, qui nous apparaît comme la terre promise ! Notre programme : se reposer et lire à l'ombre des arbres du camping... Et surtout, manger autre chose que du nsima ! (oui, on aime bien ça mais quand même... en manger trois fois par jour ça nous a quand même fait beaucoup !) Nous passons deux semaines à Lusaka avant de partir pour la pause de Noël en France. On avait prévu de faire deux trois trucs, comme aller au musée.. Et puis finalement la chaleur a eu raison de nous et on doit bien avouer qu'on n'a pas fait grand chose ! 


Pourtant Lusaka est une ville sans intérêt. Une architecture assez austère et peu d'animation chaotique mais sympathique comme les autres capitales africaines que nous avons visitées. On y croise aussi beaucoup d'expats, visiblement très aisés. On a eu l'occasion de voir un aperçu de ce petit monde en faisant un airbnb. Grande maison, grand jardin, avec le petit personnel (gardien, jardinier, bonnes) recevant beaucoup de critiques et de reproches.. Ça nous a mis mal à l'aise et on était contents d'en partir. On a retrouvé notre tente et le camping avec plaisir. 


En Zambie, il y a une immense différences entre les villages et les villes. Ce sont deux mondes qui cohabitent, sans n'avoir plus rien en commun. Un avant goût de l'Afrique australe.. En Zambie rurale, les voitures se font rares ou sont vraiment des épaves. À la place, les gens marchent des kilomètres entre les villages ou roulent à grands bruits sur des vélos sans âge. La campagne zambienne nous paraît très pauvre. Les maisons sont des petites cases de bois et de paille, les enfants courent tout nus ou en haillons dans la brousse, et il y a peu de choses à acheter dans les épiceries. La Zambie urbaine, avec ses centres commerciaux climatisés et ses fast-food aseptisés ressemble à n'importe quelle ville américaine sans âme. Il y a beaucoup de grosses bagnoles. Les gens y sont plus riches, avec l'émergence d'une classe moyenne. Mais le surpoids y est un gros problème. Il faut dire qu'en ville le menu saucisses frites coca remplace le nsima légumes. 


Des inégalités de cet ordre, nous en avons vu beaucoup, et pas qu'en Afrique. En réalité, le gâteau est immense.. Mais la façon de le distribuer explique beaucoup de choses. La pauvreté en Afrique est souvent présentée comme une fatalité ou comme un fait immuable. L'excellent livre "Repenser la pauvreté" d'Esther Duflo donne un tout autre éclairage à ce sujet complexe, pour ceux que cela intéresserait. 


Et puis la grande pause ! Les grandes vacances de Noël.. On va pas vous mentir, on a beau faire les aventuriers ça nous a fait un bien fouuuuuu !! On est revenus plein d'amour, de super souvenirs avec tout le monde, d'énergie, de fraîcheur et de ventres tout contents... Deux nouvelles personnes ! Ben oui, ça fatigue de peregriner sur son vélo.. Et comme on nous l'a souvent fait remarquer, c'est vrai qu'on n'a pas choisi les pays les plus faciles et reposants pour rouler..


Quand on revient, la saison des pluies a commencé et tout ce qui était sec, grillé et poussiéreux est maintenant tout vert et frais. C'est beau !! Nos vélos aussi se refont une petite santé, on change la chaîne et la cassette 

On est contents de retrouver nos habitudes mais la reprise du velo après une aussi longue pause, c'est dur ! Le vélo semble super lourd, c'est presque difficile de le diriger. Ça nous rappelle nos premiers kilomètres au Kirghizstan : on n'arrivait à peine à déplacer nos vélos et on ne comprenait rien à ce qui nous arrivait dans la chaleur et la poussière des rues de Bishkek avec du monde partout autour.


Mais les habitudes reviennent vite.. Après trois jours à remettre en ordre nos affaires et notre appétit, on repart et on fait 50km dans l'aprem. On retrouve tout ce qu'on a connu en Afrique : les pistes de terre rouge, les mamas en boubou qui portent des sacs sur la tête, les écoliers qui courent à côté de nous, les mecs qui poussent des vélos surchargés, les matatu qui nous frôlent, la musique, la bouillie de maïs, la chaleur et même les moustiques ! 

De Lusaka à Livingstone

On est repartis sur la route direction Livingstone, les chutes Victoria et la frontière du Zimbabwe ! On a pu remarquer une fois de plus la formidable capacité d'adaptation du corps. Si nous passons nos premières journées écarlates à cause de la chaleur, assez vite nos corps se rehabituent aux températures locales.. Bon, on souffre toujours, mais avec moins de manifestations physiologiques ! La pluie a beau avoir fait son entrée, il fait toujours 40° à l'ombre... Sur la route, notre thermomètre dépasse allègrement les 45°et la première semaine on a du mal à pédaler plus de 10km sans faire une longue pause pour retrouver nos esprits.

 

Enfin, il y a quand même des Zambiens qui réussissent à porter des vestes ou des bonnets ! 


La piste est par endroit ponctuée de grosses mares mais ça roule très bien ! Rien à voir avec les pistes ougandaises en saison des pluies ! Il y a beaucoup de moustiques, encore plus qu'avant comme on est maintenant en saison humide.. On a toujours peur du paludisme à chaque piqûre. On connaît pas mal de voyageurs via whatsapp qui ont eu la maladie ces derniers mois et on aimerait vraiment passer notre tour ! On ne prend aucune médecine préventive (dangereuse et inefficace). Mais on a avec nous le test pour savoir si on a contracté la maladie, et les médicaments à prendre le temps de se rendre à l'hôpital le plus proche ! 


Un de nos rayons casse dès le troisième jour. On aurait peut être dû changer les roues.. Nos vélos commencent à avoir vu du pays et on a beaucoup roulé sur des mauvaises routes. Ils montrent de plus en plus de signes de faiblesse.. La jante est tellement déformée qu'on n'arrive même plus à visser le nouveau rayon. On finit par s'en sortir avec une réparation à l'arrache en tordant deux rayons ensemble pour en faire un plus long de fortune. 


À Kafue, on décide de tenter un petit raccourci qui n'existe pas sur les cartes, en longeant les rails. La route passe beaucoup plus loin et fait 40km de plus. On se dit que, comme dans beaucoup de pays voisins, le train ne doit plus être en activité depuis le départ des anglais. Il y a beaucoup de monde sur les voies, assis à jouer aux dames ou à vendre toutes sortes de choses et beaucoup de vélos ou motos qui longent les rails. On nous confirme qu'on peut passer. Le chemin n'est pas toujours évident à suivre, parfois il n'y a que les rails et des pierres. Les locaux sont morts de rire de nous voir là, sur ce petit raccourci local. À un moment, il faut passer sur un assez long pont qui surplombe l'impressionnant fleuve Kafue. Nous ne sommes pas les seuls deux roues à emprunter ce pont et les croisements sont délicats. On est contents lorsqu'on retrouve enfin la piste, avec un peu plus de place pour rouler. Quelques heures plus tard, on entend et voit le train passer sur les rails. Visiblement, ce chemin de fer n'était pas désaffecté. Enfin, nous n'avons pas pris de grands risques non plus. Les locaux empruntaient le même chemin ce matin là, le train n'était donc pas prévu. Quand on fait ce genre de choses, les gens nous disent souvent "vous êtes africains maintenant" et ça fait rire tout le monde :)


Dans le même registre, quand on demande où est le puits ou la pompe pour remplir nos bouteilles, les gens sont super étonnés. Ils nous demandent : "you can drink african water??" Alors on leur explique qu'on a l'habitude et qu'on traverse l'Afrique subsaharienne à vélo. En général, ils font "tss tss" et tout le monde explose de rire ! 


La route principale est encore très monotone : une ligne toute droite et des camions. Alors comme d'habitude, on prend le plus souvent les pistes (même si ça nous secoue pas mal par endroits et qu'accessoirement ça casse donc nos rayons). Mais parfois, ce n'est pas possible de ne pas prendre la route principale car il n'y a plus de pistes et de villages dans la brousse, seulement de grands parcs nationaux où batifolent les quelques grands mammifères africains encore en vie, et où il n'y a donc heureusement pas de route ! 


La route principale est donc, comme souvent, une ligne toute droite pas bien passionnante. Seule distraction : faire coucou à tout le monde. Mais en Zambie, cette distraction n'est pas des moindres ! Au risque de me répéter, quels amours ces Zambiens ! Les gens les plus gentils de la terre ! Un coucou en Zambie ça se fait avec le bras levé le plus haut possible, un sourire qui vient directement du cœur et tous les mots les plus gentils que peuvent se souhaiter deux inconnus qui se croisent. Un océan de douceur ! 


Les taxis brousse ou matatu sont toujours là : des mini bus pleins à craquer, jusque sur le toit, qui s'arrêtent où tu veux, qui ne coûtent rien mais qui attendent des plombes pour partir jusqu'à ce qu'ils soient vraiment pleins à craquer (c'est à dire que quand toi tu crois que c'est plein à craquer, on est à peu près à mi remplissage). Dans les matatu, il y a toujours un duo : le chauffeur et le "chef d'orchestre". Ce dernier place les gens, les somme de se serrer, monte les gros paquets ou les cages de poules sur le toit, récupère l'argent de la course.. Il est aussi responsable du remplissage le plus optimal du matatu et donc doit signaler leur passage aux piétons, même ceux qui ne sont pas sur le bord de la route, mais au village en contrebas. Le passage d'un matatu est donc très bruyant, avec le chef d'orchestre qui crie, tape sur la portière ou siffle..  


L'ennui sur une route zambienne est donc très relatif ! 


Les Zambiens sont majoritairement de confession chrétienne. Et quand je dis chrétienne, c'est avec des dizaines de différentes branches du christianisme ! On n'aurait jamais cru qu'il en existait autant !! Les gens sont très croyants et la religion occupe une place prépondérante dans la vie de tous les jours. Pas un bus, une école ou une épicerie qui n'ait son petit slogan religieux ! Les églises sont partout, sans exagérer, à peu près une tous les 500 mètres ! C'est vraiment très impressionnant !


C'est toujours un plaisir de rouler en brousse le week-end. Les chants religieux résonnent d'un peu partout et qu'ils soient ambiance gospel ou plus classique c'est toujours magnifique ! Une ambiance un peu magique que de rouler en écoutant tous ces chants. La messe a parfois lieu dehors, sous l'ombre d'un manguier.. L'ambiance est plus détendue et joviale que chez nous. On danse presque lors de la messe ! Et on a beau ne pas être adeptes de la chose, on s'est souvent arrêtés pour écouter la messe en Zambie. Juste pour le plaisir d'écouter un peu plus longtemps la beauté des chants. 


Les gens sortent aussi leurs plus beaux apparats pour aller à l'église et on croise donc des papys en costard vintage ou des petites filles en robe de princesse ! 

La Zambie est aussi le premier pays d'Afrique où on refait du camping sauvage. Les distances peuvent parfois être grandes entre deux villages et on se sent en sécurité ici. Parfois des gens passent près de notre tente, ils nous font coucou puis continuent leur chemin. Après des mois de sécheresse et de monde autour de nous, on se délecte du calme, de la verdure, de l'ombre et des bivouacs en pleine nature ! Comme il pleut quand même assez peu, on ne met pas la bâche étanche par dessus notre tente. On peut donc profiter des patchs de moustiquaire pour regarder les étoiles avant de s'endormir, directement allongés dans la tente ! La belle vie !


On aura donc vraiment apprécié notre traversée de la Zambie, et particulièrement entre Lusaka et Livingstone où les paysages tout verts étaient magnifiques ! Les Zambiens tellement souriants et adorables classent directement la Zambie dans nos pays coups de cœur !


Mention spéciale avant de partir pour :

-ceux qui pedalent avec leur téléphone dans la bouche car ils n'ont pas de poches

- ceux qui nous répondent "okay" quand on leur dit bonjour 

- ceux qui pedalent assis sur le porte bagage car leur selle est cassée 

- ceux qui pour nous appeler nous sifflent ou nous font "pssssssssst" (c'est à dire à peu près tout le monde car c'est comme ça qu'on s'appelle en Zambie ! ça nous a quand même fait bizarre au début !) 

- ceux qui vendent des choses sur la route et courent après le taxi brousse pour que les gens leur jettent l'argent par la fenêtre car le conducteur a déjà démarré 

- celui qui nous réveille à 4h du matin alors qu'on dort profondément dans la tente "my friends, my friends, are you okay?"


Thank you Zambia ! ❤️🇿🇲


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